Courir sans avancer : la Reine Rouge, le Lapin Blanc et les injonctions du Tarot
Lewis Carroll, dans De l’autre côté du miroir, nous présente la Reine Rouge, personnage paradoxal qui explique à Alice qu’elle doit courir sans cesse pour simplement rester sur place.
Dans Alice au pays des merveilles, c’est le Lapin Blanc qui court, toujours en retard, pris dans une course effrénée qui semble ne mener nulle part.
Ces figures emblématiques illustrent les pressions et les injonctions absurdes qui régissent leur monde, un thème qui trouve un écho puissant dans le tarot.
La Reine Rouge et le 8 de Bâtons
Le 8 de Bâtons est la carte du mouvement rapide, du progrès fulgurant, de l’accélération soudaine des événements. Pourtant, dans le monde de la Reine Rouge, cette précipitation ne mène qu’à un statu quo. « Ici, vois-tu, il faut courir tant qu’on peut pour rester au même endroit », explique-t-elle à Alice. Cette injonction rappelle les rythmes effrénés de la société moderne où l’on doit sans cesse avancer, produire, se dépasser, sous peine d’être laissé de côté.
Dans une lecture de tarot, le 8 de Bâtons peut symboliser un moment où tout s’accélère, mais aussi une alerte : court-on vers un véritable objectif ou simplement pour répondre à une pression extérieure ? La Reine Rouge nous met en garde contre l’illusion du progrès lorsqu’il est dicté par une frénésie vide de sens.
Le Lapin Blanc et le Page de Deniers
Le Lapin Blanc, avec sa montre à gousset et son inquiétude perpétuelle, est l’image même du Page de Deniers inversé. Le Page de Deniers représente l’apprentissage, la patience et la concrétisation des idées. Mais lorsqu’il est pris dans l’urgence, il devient un étudiant anxieux qui court après ses obligations sans jamais se sentir prêt.
Le Lapin Blanc, à force de s’angoisser sur son retard, oublie d’être dans l’instant. Dans un tirage, cette carte peut pointer du doigt la procrastination, l’angoisse face aux responsabilités ou le sentiment de ne jamais en faire assez. Comme Alice qui le suit aveuglément au début de son aventure, nous pouvons nous retrouver entraînés dans une course dictée par des injonctions externes au lieu d’écouter notre propre rythme.
Des injonctions contraignantes : la critique de Lewis Carroll
À travers ces personnages, Lewis Carroll pose une question fondamentale : pourquoi acceptons-nous ces règles absurdes ? Pourquoi courir sans but réel, pourquoi se plier à des exigences qui nous dépassent ? Son époque (le XIXe siècle), marquée par une rigidité sociale extrême, imposait des normes strictes sur le temps, la productivité et le rôle de chacun.
Le tarot nous invite à nous questionner. Le 8 de Bâtons peut-il être une énergie positive de progression, ou nous pousse-t-il dans une dynamique épuisante ? Le Page de Deniers cherche-t-il à apprendre sereinement, ou est-il englué dans des attentes inaccessibles ?
Comme Alice, nous avons le choix : suivre la course effrénée de la Reine Rouge et du Lapin Blanc, ou nous arrêter un instant pour comprendre où nous allons. Le Tarot nous guide dans cette réflexion, en nous donnant les clés pour discerner ce qui est un véritable progrès de ce qui n’est qu’un mouvement imposé.
Laisser un commentaire